LeRomanais

Agir local, penser global. L’internet local à Romans-sur-Isère et ses environs (Drôme).

Comment libérer des données publiques, concrètement ?

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Le canton de Bourg-de-Péage et du pays de Romans ont récemment édités un intéressant Guide de la vente directe, de la ferme à l’assiette (.pdf), qui présente et répertorie quelques 91 producteurs locaux de fruits, légumes, viande, etc. qui proposent des modalités de vente directe.

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Ce guide référence de très nombreux producteurs locaux, mais pas tous, et en les limitant à une circonscription administrative précise, qui ne correspond pas à nos bassins de vie, c’est-à-dire à la manière dont nous circulons sur le territoire. Le format sous lequel il est présenté, de surcroit, ne correspond pas vraiment, pour ma part, à la façon dont j’ai besoin de consulter ces informations : pour ma part, j’ai plutôt besoin d’une carte, avec des données que je puisse récupérer pour les agréger à mes propres cartes… Sur le site de l’Office de tourisme de Romans-Bourg-de-Péage, vous avez accès, via la cartographie, à l’ensemble de ces producteurs locaux, répertoriés sur une carte. Mais vous ne pouvez pas ajouter d’entrée, ni télécharger les données, ni agréger ces données à vos propres cartes. Et le moteur de recherche associé ne pointe pas sur la carte, mais uniquement sur les documents bruts du site : impossible par exemple d’accéder directement à une fiche ou à la carte en faisant une recherche.

La base de donnée des producteurs locaux devrait être libre et accessible aux citoyens comme bon leur semble. J’ai donc décidé, unilatéralement, de la libérer. Je suis persuadé qu’elle devrait intéresser de nombreux sites : sites de maisons de quartiers souhaitant promouvoir la production locale et pouvant donner accès autrement à une liste de producteurs locaux (les trois maisons de quartier de Romans proposent toutes des paniers d’Amap locales), sites d’écoles d’agriculture (Lycée horticole de Romans, MFR de Mondy et leurs nombreux sites satellites, comme l’excellent Un monde allant Vert) souhaitant utiliser ces données pour les mixer aux leurs et les compléter, sites de ces mêmes producteurs locaux, qu’ils soient référencés par les producteurs du coin ou de Ferme en Ferme ou pas (comme c’est le cas de la plupart des producteurs, qui ne sont pas référencés dans ces bases, ni toujours sur les PagesJaunes et qu’on trouve souvent au détour d’un panneau sur les routes qu’on parcours), simples citoyens désireux de contribuer à l’amélioration de ces données, au-delà de limites administratives fictives qui nous sont proposées, etc.

Comment faire ?
J’ai donc passé ce guide en tableur en utilisant Google Docs et notamment GoogleForm et GoogleSpreadsheet, les applications de Google permettant de créer très facilement des Formulaires en ligne et des bases de données.

Restait, une fois les données récupérées (via un simple mais patient copié-collé d’information – et oui, l’extraction de données publiques, c’est d’abord du copié-collé !), à géolocaliser les adresses. Et si cela peut être simple quand on a des données clairement référencées (avec des identités, des numéros, des noms de rues, un code postal précis), force est de constater qu’il est bien plus dur de géoréférencer des adresses en milieu rural où le quartier, le lieu dit, voir la seule identité du producteur fait office d’adresse. Les outils utilisables pour faire ce travail (comme BatchGeocode ou Click2Map – merci Loïc Haÿ et son WidgetOLab) produisent bien souvent des approximations. Cependant, ils ont également un avantage : celui de vous montrer les erreurs que vous avez fait dans la collecte des données.

Pour ma part, j’ai ajouté déjà 5 fiches au document originel : notamment celle du producteur de Pommes, pêches, cerises et abricots où je me fournis quasiment chaque semaine et qui n’était pas dans le guide. Et celles de quelques autres, qui n’entrent pas dans les limites administratives du guide, mais chez lesquels il nous arrive de passer (il n’y a que les administrations pour penser leurs limites avec des frontières étanches). Et je suis persuadé qu’il y en a encore beaucoup d’autres, qui ne sont pas indiquées dans les guides…

Ce qui est libéré !
Vous pouvez accéder au formulaire pour compléter le référencement. Voici le moteur de recherche qui permet de regarder si le producteur que vous souhaitez ajouté y est déjà. Et voici la base de donnée que vous pouvez réutiliser comme bon vous semble (disponible en de multiples formats .csv, Excel et OpenDocument si vous utilisez OpenOffice. La base est même disponible au format RSS pour surveiller les ajouts). Depuis la carte générée par BatchGeoCode (tout en bas de la page), on peut produire un fichier .kml que vous pouvez ensuite déverser dans n’importe quel outil générant de la cartographie Umapper par exemple ou Google Maps…).

Cette dernière carte, pour l’instant, n’est pas finalisée. Google Maps n’a pas sauvegardé toutes les données, notamment les regroupement par catégories tels qu’on les distingue ici. Pour qu’elle soit fonctionnelle, il faut corriger la mise en page et visiblement (hélas) rééditer à la main les catégories (fait)…

(et oui, c’est pas facile tout ces systèmes incompatibles entre eux).

Mais le but, désormais est que vous puissiez utiliser ces données pour tout autre chose : créer des graphes, les ajouter à d’autres données (par exemple sur un répertoire des commerces qui proposent des produits locaux, je ne sais pas), les mixer à d’autres données (on pourrait les combiner par exemple avec des images issues de Flickr pour faire qu’à chaque fiche corresponde une image piochée automatiquement dans la base de données géographique – il faut que j’essaie de faire cela avec un YahooPipes ! – je vous tiendrais au courant)…

Si vous souhaitez utiliser ces données, libre à vous, mais je vous serais reconnaissant de le faire savoir en commentaire.

Tout ça pour quoi ?
Tout ça pour mieux comprendre, concrètement, à ma modeste échelle, sans être programmeur, ni utiliser des outils de récupération de données évolués, ce vaste discours sur la libération des données publiques – duquel je participe. J’ai voulu, volontairement, prendre un exemple concret, précis, et voir ce qu’il était possible de faire.

On peut imaginer faire cela sur bien d’autres répertoires de données, à la manière de ce que font les gouvernements britanniques ou américains, ou ce que font des collectifs français comme Regards Citoyens.

Ce petit exemple montre en tout cas que l’exploration pratique dans les territoires n’est pas si simple. Que l’accès aux données (à des données fraiches, datées, à jour, complètes…) est compliqué. Et qu’il est même difficile d’imaginer ce qu’on peut en faire, concrètement. Comme le soulignait Benoït Thieulin de la Netscouade lors de l’Open Data Camp de janvier dernier : quelles sont les données qui sont exploitables ou disponibles dans de multiples autres domaines que le tourisme ou le transport, qui sont souvent les secteurs les plus structurés par les données ? Quelles données environnementales les services de la ville ou du département amassent ou pourraient donner accès ? Quelles données économiques (notamment sur l’emploi) sont accessibles et seraient libérables ? Quelles données d’exploitation de services publics pourraient donner naissance à des applications « décisives » ?

On le voit en tout cas, localement, l’enjeu est de donner accès à des petits répertoires de données bien souvent, qui peuvent permettre à d’autres acteurs locaux de gagner du temps. Qui mis bout à bout peuvent prendre du sens. Hormis les données récoltées automatiquement, beaucoup auront besoin d’embarquer les citoyens pour les améliorer et les rendre plus utilisables : car sans leurs enrichissements, finalement, ces données libérées n’auront bien souvent que peu d’impacts…

Reste encore à les rendre utilisables par tous… Et on devine que là ce n’est pas aussi simple qu’on voudrait le croire…

On voit bien qu’il ne suffira pas d’en parler, et les bons exemples d’OpenStreetMap ne suffisent pas (la cartographie libre et collaborative, qui seule permet d’avoir des données précises d’accessibilité sur une ville par exemple, car les données d’OSM peuvent être corrigées par les gens, là où celles de GoogleMaps ne peuvent pas l’être : par exemple, la rue du 19 mars 1962 à Pizançon est accessible dans les 2 sens sur OSM (ce qui est le cas) alors que sur GoogleMaps elle est faussement indiquée en sens unique). La libération des données publiques, même au niveau local reste encore un chantier…

Written by leromanais

2 février 2010 à 17 h 59 mi

22 Réponses

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  1. En y réfléchissant après coup, je me dis que le plus difficile est d’être clair pour savoir vraiment où est le bon répertoire de données. Assurément, pour l’instant, c’est la base de données… Mais il faut pouvoir continuer à l’augmenter facilement (en passant par un formulaire), il faut y ajouter par exemple les données de gélocalisation (précises et approximatives), etc.

    Même l’entrepôt de données n’est pas si simple à documenter.

    leromanais

    3 février 2010 at 9 h 39 mi

  2. Bonjour Hubert,

    Initiative très interessante ! Nous sommes en train de développer un groupe local sur Nantes pour aller dans ce sens.
    Avez-vous eu des retours des éditeurs du Guide ? Que pensent-ils de cette initiative et vont-il s’appuyer sur vos travaux pour améliorer leur version papier ?

    Libertic

    3 février 2010 at 10 h 51 mi

  3. Merci pour cet article. Pour avoir cherché des statistiques locales sur le chômage, l’emploi et les licenciements, j’ai pu constaté qu’il était impossible d’accéder à des informations qui devraient pourtant être publiques. Et quand on y accède c’est de façon fragmentaire et avec des mois, voire des années de retard.

    FrancL

    4 février 2010 at 12 h 29 mi

  4. @Libertic : on va attendre que ça monte et ça redescende dans les services…

    @FrancL : oui ! Impossible d’avoir accès à des chiffres mensuels sur l’Etat de l’offre, de la demande, du chômage sur un territoire. Ces chiffres doivent exister quelque part : ils ne sont visiblement pas public ! Je pense qu’il y en a beaucoup d’autres comme ça… Pourtant, données payées par le service public devrait signifier données publiques ! Ouvertes, partagées, accessibles. Les études payées par les deniers publics au profit des collectivités notamment devraient être publiques également, accessibles en ligne, à tous. On en est loin. Bien souvent, elles servent des intérêts particuliers et permettent à certains réseaux d’être bien informés. Mieux que d’autres.

    Hubert Guillaud

    4 février 2010 at 15 h 27 mi

  5. Belle expérience et beau résultat.
    Je travaille sur un projet similaire à l’échelle nationale et je suis très heureux de voir que je ne suis pas le seul intéressé.
    Je partage votre point de vue pour la libéralisation des donnés publiques (géographe et urbaniste je sais comment il est difficile de retrouver ou utiliser ces données).
    Mais je me dois de préciser que je ne vois pas en quoi l’adresse de producteur privé est une donnée publique. Jusqu’à preuve du contraire ceux qui sont référencés ont accepté. Le fait de mettre à jour la base avec des adresses d’autres producteurs me pose question. Une base de donnée avec nos adresses serait-elle aussi une donnée publique ?

    bdupraz

    5 février 2010 at 19 h 48 mi

  6. Ce sont des adresses de producteurs qui font de la vente directe, c’est-à-dire qui vendent aux gens qui se présentent chez eux, aux conditions et horaires précisés. Il y a donc rien de plus public en l’occurrence. C’est comme si on faisait une base de donnée avec des commerces. Si ce n’est qu’ici, ce sont des producteurs locaux.

    Hubert Guillaud

    5 février 2010 at 21 h 24 mi

  7. Je reviens sur ce sujet pour signaler un dossier intéressant dans Courrier International de cette semaine (25 février au 3 mars): « La tyrannie de la transparence ». Le titre du dossier est très mauvais mais son contenu très intéressant !

    FranckL

    1 mars 2010 at 13 h 19 mi

  8. sur le même sujet je vous signale un article d’Actu-abondance: http://actu.abondance.com/2010/03/google-public-data-explorer-met-en.html
    et bravo pour le travail

    lorran

    12 mars 2010 at 13 h 19 mi

  9. Cet article a été repris sur @Brest, le site initié par la ville de Brest qui relie acteurs et actrice du multimédia en Bretagne. Les initiatives romanaises n’intéressent pas les Romanais, mais attirent l’attention au-delà de leurs frontières… 😉

    Hubert Guillaud

    14 mars 2010 at 14 h 32 mi

  10. Bravo Hubert pour cette belle initiative.
    ça me donne des idées, je vais voir ce que je peux faire dans mon coin (ouest lyonnais) sur la même thématique, en commençant par chercher les sources disponibles (assos de producteurs, de ferme en ferme …).
    Pour moi, sur ce thème, il serait intéressant d’ajouter la mention agriculture biologique, et permettre une recherche sur ce critère spécifique.

    Philippe Cazeneuve

    15 mars 2010 at 19 h 27 mi

  11. Merci Philippe… Je ne sais pas où je pourrais trouver des informations sur le sujet des agriculteurs biologiques… Et il faut qu’ils vendent au public, pour que le sujet garde sa cohérence : celui d’être ouvert aux gens…

    leromanais

    16 mars 2010 at 10 h 00 mi

  12. L’ARDAB (asso des producteurs bio de Rhône-Alpes est en train de constituer une base de données ici :
    http://www.corabio.org/trouver-des-produits-bio-en-rhone-alpes
    Sinon il existe des catalogues par département, par ex : « Guide de la bio en Drôme – Vente directe »

    Cliquer pour accéder à drome_guide_bio.pdf

    A+

    Philippe Cazeneuve

    16 mars 2010 at 10 h 09 mi

  13. Super Philippe, tu viens de m’ajouter du travail !

    😉

    leromanais

    16 mars 2010 at 10 h 13 mi

  14. Tentative de valorisation des données libérées par Hubert : génération d’une version mobile à partir du flux GeoRSS de la carte source avec Mobile GeoRSS Maps de Map Channels. Vous pouvez maintenant consulter en mobilité les producteurs locaux référencés et vous géolocaliser pour visualiser le ou les plus proche(s) de vous > http://bit.ly/a1ZXAl (à ouvrir avec le navigateur de votre téléphone …)

    loichay

    17 mars 2010 at 10 h 26 mi

  15. Merci Loïc ! Cette possibilité de consultation mobile, pour ce type de données, est vraiment très précieux. C’est tout l’enjeu, faire que ces données soient toujours plus facilement accessibles…

    Hubert Guillaud

    17 mars 2010 at 11 h 04 mi

  16. Tentative de valorisation des données libérées par Hubert : cartographie automatique des données renseignées via le formulaire avec Mapalist. Malheureusement, l’affichage de données est restreint à quelques champs et les accents ne sont pas pris en compte (charset UTF8) dans les descriptions … en revanche, la catégorisation est possible et les données sont rafraîchies automatiquement toutes les 24h à minuit 😉 Voir le résultat : http://bit.ly/c6iuvs

    loichay

    17 mars 2010 at 11 h 23 mi

  17. Tentative de valorisation des données libérées par Hubert : visualisation des producteurs géoréférencés avec le plugin web Google Earth grâce à Takeitwithme > http://bit.ly/crOs6n

    loichay

    17 mars 2010 at 13 h 45 mi

  18. Transformation avec Map Channels : le moteur de recherche en auto-complétion et autres fonctions complémentaires apportent une valeur ajoutée intéressante > http://tinyurl.com/yz7cygk

    loichay

    17 mars 2010 at 15 h 21 mi

  19. démarche bien intéressante. Dommage d’utiliser une carte google map …

    Connaissez-vous le principe des cartes vertes ? L’association Frapna de Rhone Alpes a développé une carte de ce type : http://www.greenmap.fr/carte-rhone-alpes.html

    La carte ouverte de Rennes associe bien les données libres sur une carte libre : http://rennes.carte-ouverte.org/

    Christouf

    19 Mai 2010 at 7 h 18 mi

  20. Oui Christouf…

    Loïc Haÿ utilise ces données pour son atelier GéoBidouille qui se tient actuellement au Forum des usages de Brest. Cliquez les slides pour voir concrètement ce qu’on peut faire depuis les données… Impressionnant !

    leromanais

    30 juin 2010 at 13 h 25 mi

  21. […] trouveront cette première liste encore bien réduite : on aimerait que tous les producteurs locaux soient de la partie. Pour ma part, je la trouve encourageante. Elle va même me conduire à faire certains changements […]


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